Le Massacre de Fort Apache - Fort Apache - 1948 - John Ford

[Faja]

Affecté contre son gré dans un fort isolé de l'Arizona, le lieutenant-colonel Owen THURSDAY (Henry FONDA) accompagné de sa fille PHIL (Shirley TEMPLE) prend son commandement dans un climat tendu.

Tandis que sa fille tombe sous le charme du jeune lieutenant O'ROURKE (John AGAR), il entreprend de rétablir la discipline.

Mais sa conception très rigide des relations avec les indiens se heurte à celle beaucoup plus pragmatique du capitaine Kirby YORK (John WAYNE) et il refuse tout compromis avec "ces sauvages" comme il les qualifie.

L'affrontement avec les Apaches est inévitable.

Beaucoup a été dit et écrit sur ce premier volet de la géniale trilogie de la cavalerie de John FORD.
On y retrouve comme dans les deux autres volets, les rituels militaires, des scènes de la vie quotidienne dans un fort, le mélange de comédie et de drame si caractéristique du récit fordien, le décor sublime de Monument Valley, la terre sacrée des Navajos qui par la magie du cinéma devient territoire apache et bien sûr John Wayne accompagné de l'explosif Victor McLaglen.
On ajoutera que John Agar souvent partenaire du Duke lui aussi, était le mari de Shirley Temple au moment du tournage du Massacre de Fort Apache.

Mais ce qui fait l'originalité de ce film, c'est la personnalité complexe du colonel Thursday incarné à la perfection par Henry FONDA et qui ne peut être réduit comme le font certains, à un clone du général Custer de Little Big Horn.
De 1939 à 1948, FONDA a été l'acteur fétiche de FORD avant que WAYNE prenne le relais : deux styles très différents mais deux interprètes exceptionnels.

Ancien général de l'Union pendant la guerre civile, le colonel Thursday supporte mal d'avoir été rétrogradé et quand il arrive dans ce fort perdu de l'Arizona où personne ne l'attend, il a l'impression d'être tombé au fond d'un trou.
Si ces humiliations l'accablent, elles renforcent aussi l'arrogance avec laquelle il affiche sa supériorité, hautain et raide comme une saillie.
Cet homme moralement brisé se montre lui-même cassant avec les autres ; ses rapports avec eux se réduisent à des rapports de force qui s'expriment toujours par la contradiction et la confrontation.
Il se sait sur une voie sans issue : seul depuis la mort de son épouse, il voit sa fille amoureuse d'un simple lieutenant s'éloigner peu à peu de lui comme s'éloignent tous ses rêves de gloire.
Et au moment de l'affrontement final, tandis qu'il pourrait échapper à la mort, il se jette dans la mêlée non pas comme un héros mais comme un désespéré qui se jette dans une rivière.
Dès lors, l'une des dernières scènes du film ressemble à une humiliation posthume :
York, le nouveau commandant du fort et quelques journalistes sont réunis devant le portrait du glorieux colonel désormais général, trônant au-dessus d'une cheminée et ils tissent sa légende en célébrant ses exploits.
C'est comme si le véritable Thursday avec ses failles et ses démons n'avait jamais existé.

[Rex Lee]

Comment ne pas être d'accord avec cette excellente analyse?
Mais cela fait très longtemps que je l'ai vu et si ça se trouve, le bon souvenir que j'en garde en prend un coup lors d'un nouveau visionnage! Cela arrive de temps à autre et pas qu'à moi, je suppose. Alors, je m'abstiendrai de le revoir pour l'instant...