La charge héroïque. She wore a yellow ribbon. 1949. John Ford.

[Rex Lee]

Le deuxième volet de la trilogie de Ford à la gloire de la cavalerie américaine a maintenant sa place sur ce forum.
Bon, tout le monde le connaît et il y a certes des choses qui peuvent agacer comme la façon dont sont traités les bleus par les anciens et le personnage de vieille baderne joué par Victor MacLaglen. Ford use et abuse de tout cela, d'un film à l'autre. Mais c'est un peu la marque de fabrique de ses westerns des années 40-50...

On peut donc d'abord s'intéresser à l'histoire de ce capitaine Nathan Brittles qui vient d'atteindre l'âge de la retraite mais qui doit accomplir une ultime mission: escorter jusqu'en lieu sûr la femme du commandant du fort et sa nièce car les Indiens sont sur le sentier de la guerre.
On peut aussi en apprécier la mise en scène rigoureuse.

Et on peut enfin admirer ceci:

[old timer]

Effectivement, j'ai les mêmes réserves que toi sur les pitreries de Mclaglen, mais John Wayne est remarquable dans ce film, dans un personnage assez émouvant.

Et effectivement, la scène de l'orage, nuages noirs et éclairs au loin derrière la colonne de cavalerie, c'est un moment magnifique, un tour de force au niveau technique (le chef op' ne voulait pas le faire au début - et il a finalement eu l'oscar pour cette scène) et un de ces moments où un surplus de réalisme dans le cinéma débouche finalement sur la poésie pure.

[Colonel Kirby]

+ 1 pour le rôle de John Wayne.
Mais j'aime bien aussi celui de Victor McLaglen (surtout la scène dans le saloon du fort ! )

Et puis cette chanson de la Cavalerie américaine qui revient souvent ; "She wore a Yellow Ribbon"

[Faja]

Et cette fameuse chanson-titre " Around her neck, she wore a yellow ribbon" est parodiée dans le film de façon grivoise par le blessé que la femme du Major soigne dans le charriot alors que l'orage gronde ; ça devient " Above her knee, she wore a yellow garter" ( au dessus de son genou elle portait une jarretière jaune ).

Ce film magnifique est hanté par la vieillesse et la mort.
Et chez FORD la bouffonnerie n'est jamais loin de la tragédie, comme dans la vie.

[Faja]

Vu et revu ce film magnifique dont je ne me lasse pas, d'autant que j'ai eu la chance, il y a 20 ans, d'aller à Monument Valley et d'entrer dans "la cabane" du capitaine Brittles qui était toujours là près du Goulding's Lodge.

Elle portait un ruban jaune tel est le titre que John FORD lui a donné en faisant allusion à la coutume vestimentaire des jeunes filles amoureuses d'un cavalier US.
Le titre français est bien moins romantique et surtout abusif : la charge héroïque n'est en réalité qu'une attaque non violente destinée à faire fuir les chevaux des indiens ("aller à pied les humilie" dit le capitaine Brittles).
Ce n'est pas un film de guerre, c'est un film mélancolique empreint d'humanité et de tristesse.
Il parle du cérémonial militaire qui rythme la vie du groupe et assure sa cohésion.
Il parle du ciel plombé embrasé par l'orage qui écrase les cavaliers et de l'imposante majesté de Monument Valley qui les rapetisse.
Il parle de leurs épuisantes chevauchées et des marches forcées qu'ils s'imposent pour soulager leurs montures.
Il parle du temps qui passe inexorablement en usant les corps et de la douloureuse certitude que tout a une fin.

Il dit aussi que les vivants et les morts appartiennent au même monde, à la même communauté : en égrenant les noms des hommes de Custer massacrés par les indiens à Little Big Horn, le capitaine Brittles les ramène à la vie, tout comme sa femme décédée est réellement présente quand il parle avec elle sur sa tombe.

Et comme toujours avec FORD, pour contrebalancer les moments dramatiques, il y a les chansons, les bals, les jeux de l'amour, les beuveries et les grosses déconnades.

C'est certainement son meilleur western avec Les Cavaliers, supérieur selon moi à La Prisonnière du Désert souvent encensé mais qui n'est qu'un demi-chef-d'œuvre ; la première heure est géniale, la seconde beaucoup moins : le scénario use d'artifices ou abuse d'invraisemblances et Ford lui-même semble se désintéresser d'une histoire qui traîne en longueur.
Et c'est l'un des plus grands rôles de John WAYNE : son interprétation est aussi émouvante que parfaite.

[old timer]

"Les cavaliers", vraiment ? On n'a pas vu le même film...
Et "la poursuite infernale" alors ? Oui c'est du noir et blanc et y a pas John Wayne dedans, mais... c'est celui là mon préféré, et de loin !

[Faja]

La Poursuite Infernale est un excellent western qui nous fait notamment vivre quelques moments de la vie quotidienne dans une petite ville de l'Ouest en construction, avec un Henry FONDA magistral qui n'a rien à envier à John WAYNE même si son style est très différent.
Mais il souffre à mon avis, d'un montage pour le moins chaotique dû à ZANUCK. Ford disait de lui :  "Il savait que je détestais me rendre en salle de projection et il était tacitement convenu entre nous qu'il ferait le montage...Après il me disait qu'est-ce que vous en pensez ? et je répondais c'est tout simplement un autre film (rapporté par Leonard Mosley dans "Zanuck le dernier Grand Nabab").

Quant à Les Cavaliers, si Old Timer ne confond pas avec Les Deux Cavaliers un film mineur de Ford en 1962 avec Stewart et Wildmark, alors on a bien vu le même film mais avec un regard différent.
C'est le seul film que FORD a consacré à la guerre de Sécession, si l'on excepte le court épisode qu'il a réalisé pour La Conquête de l'Ouest en 1962.
Ce film désenchanté dont le tournage a été très éprouvant et qui montre sans fioritures ni fautes de goût l'atrocité et l'absurdité de cette guerre fratricide, constitue pour moi l'un des sommets de l'œuvre de Ford : dès la première scène on a la sensation de descendre en Enfer et l'explosion finale, loin de tout happy end, confirme qu'on y est bien.
J'engage tout le monde à regarder ce film méconnu.

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