Le sang à la tête- 1956- Gilles Grangier

[MARCHAND]

L'histoire : Un armateur de La Rochelle, qui a commencé sur les quais, s'aperçoit un jour que sa femme a disparu, faisant jaser toute la communauté des pêcheurs de la ville. Son enquête lui fait découvrir qu'elle a renoué avec un amour de jeunesse, un individu peu recommandable...

Mon avis : Un voyage nostalgique dans les années 60 avec un beau trio d'auteurs, Simenon pour l'histoire, Audiard dont les dialogues portent sa patte et Gabin, toujours impressionnant. Un bon film en noir et blanc qui permet de voir une criée et quelques acteurs aujourd'hui disparus.

Pour le voir : disponible en dvd.

[MARCHAND]

Un extrait mais il y a plus !

[Faja]

La combinaison Grangier/Audiard/Gabin (non ce n'est pas un GAG mais un trio GAGnant   ) a donné naissance, dans des genres différents, à 3 œuvres majeures du cinéma français des années 50/60 :
- Le Cave se Rebiffe en 1961
- Le Désordre et la Nuit en 1958
- Le Sang à la Tête en 1956

Je viens de revoir ce film en DVD dans la superbe version restaurée 4K par Pathé en 2020 qui -cerise sur le gâteau- offre en bonus une interview passionnée et passionnante de Bertrand TAVERNIER réalisée 2 mois avant sa mort.

C'est une histoire simple inspirée d'un roman de SIMENON, un petit drame familial qui ressemble à celui qu'a vécu Aimable (RAIMU) dans La Femme du Boulanger de PAGNOL en 1938.
D'origine modeste, le docker François Cardinaud est devenu l'armateur le plus riche de La Rochelle.
Mais la classe dite supérieure qu'il a intégrée et dont il a adopté "les singeries" ne l'a jamais vraiment considéré comme l'un des siens ; même au sein de sa famille, il est jalousé ou traité comme une vache à lait.
Alors, quand sa femme quitte brutalement le domicile conjugal pour retrouver un ex-petit ami par ailleurs fils d'une poissonnière qui "sans la découverte des sulfamides(...) vérolait toute la Charente" dixit Cardinaud lui-même, les langues se délient : les hypocrites font semblant de compatir, les autres le charrient et "c'est la fête au village".
Cardinaud lui n'a qu'un objectif : retrouver son épouse ; et finalement, reconnaissant ses torts, il lui dira joliment : "Pendant 12 ans on a fait chambre commune mais on a fait rêves à part".

GRANGIER filme sans prétention mais avec une grande sensibilité, en alternant les prises de vue en extérieurs et les scènes en studio.
AUDIARD montre l'étendue de son talent en mêlant les répliques vachardes ou argotiques façon Audiard aux répliques tendres ou poétiques façon Prévert.
GABIN, à la fois imposant et fragile, incarne à la perfection François Cardinaud.

Une curiosité : chapitre 3 (0:20:40), au Café de la Paix, le violoniste vu de face à un faux air de Jack PALANCE !

Et pour le plaisir, une dernière saillie du Maître-dialoguiste :

-Hubert Mandine, associé de Cardinaud : "En amour comme en affaire, ma devise est vite et bien."
-Raymonde, la prostituée : "C'est pour ça que tu gardes tes chaussures."

Quoiqu'en disent certains, GRANGIER est GRAND.

[Rex Lee]

Quelque peu déçu par ce film. Je m'explique: avec un titre pareil, je m'attendais à un dénouement moins anodin, moins mou du genou. Disons, sinon un règlement de comptes, du moins une de ces colères homériques dont Gabin s'était fait une spécialité, baignes comprises. Sans doute Grangier et Audiard sont-ils restés fidèles à Simenon...
A propos de la collaboration Grangier-Audiard-Gabin, on peut ajouter aux trois films mentionnés par Faja: Gas-oil (1955), Le rouge est mis (1957; Audiard et Le Breton), Archimède le clochard (1959), Les Vieux de la Vieille (1960) et Le Gentleman d'Epsom (1962) qui, à défaut d'être des œuvres majeures du 7e art, valent tout de même le détour.

[Faja]

Effectivement, c'est un film assez tranquille.
Cette classique histoire d'adultère se déroule dans un milieu bourgeois très feutré où faire des vagues est inconvenant.
Le mari trompé a juste un petit coup de sang mais il ne fera pas couler celui de son rival.
Et à la fin, comme RAIMU dans La Femme du Boulanger, GABIN pardonne à son épouse.
La miséricorde est une vertu incertaine : pour les uns c'est une force de l'âme, pour les autres c'est une faiblesse de l'esprit.

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