Le journal d'une femme de chambre. 1964. Luis Bunuel.

[Richards]

Wikipédia:
Célestine, une femme de chambre de 32 ans, arrive de Paris pour entrer au service d'une famille de notables résidant au Prieuré, leur vaste domaine provincial. La maîtresse de maison, hautaine et dédaigneuse avec sa domesticité, est une puritaine frigide, maniaque du rangement et obsédée par la propreté. Célestine doit affronter les avances du mari sexuellement frustré, et elle gère avec toute la sérénité possible le fétichisme étrange du patriarche, un ancien cordonnier qui lui demande fréquemment de porter des bottines qu'il tient jalousement enfermées dans un placard.

Malgré sa répugnance, Célestine est contrainte de côtoyer Joseph, le palefrenier de ses patrons, un rustre aux tendances sadiques, raciste et activiste d'extrême droite1 qui a des vues sur elle, l'associant à son projet de s'établir bistrotier. Claire, une petite fille pour laquelle Célestine s'est prise d'affection est violée et assassinée. Célestine est persuadée de la culpabilité de Joseph...


Avis personnel:
Une adaptation très libre du roman de Mirbeau. Le film est centré sur le séjour de Célestine au Prieuré. Exit tous les flash-backs du livre qui évoquent les différents maîtres et les différentes maîtresses de Célestine, tous (et toutes) plus pervers les uns que les autres.
Sinon, c'est très maîtrisé, le noir et blanc est superbe et les acteurs sont parfaits, Jeanne Moreau et Georges Géret en tête.



Ce film a été diffusé hier soir par Arte.








Un roman qui fit scandale en 1900.

[Faja]

Si le Buñuel surréaliste de l'Age d'Or vous choque, si le Buñuel humaniste de Los Olvidados vous laisse de marbre, si le Buñuel humoriste du Charme discret de la bourgeoisie ne vous amuse pas, alors n'allez pas "vous faire foutre" comme Belmondo le conseille si délicatement dans A bout de souffle, mais regardez Le Journal d'une Femme de Chambre ; vous allez vous régaler.

C'est le premier des films que BUNUEL réalise pendant sa période française en collaboration avec l'excellent scénariste Jean-Claude CARRIERE et c'est un coup de maître.
Dans cette œuvre d'une ironie mordante mais savoureuse, chacun en prend pour son grade, les bourgeois comme les domestiques, les curés comme les sacristains.

D'apparence classique, la mise en scène de BUNUEL se distingue par son dynamisme et son style elliptique ; l'absence totale de musique, une bande-son parsemée de bruits insolites, des répliques parfois énigmatiques, des audaces techniques comme ce panoramique temporel à la 33ème minute du film, sont quelques-unes des nombreuses particularités qui l'enrichissent et qui se dévoilent au fur et à mesure des visionnages.

Les interprètes sont effectivement parfaits et en plus de la ravissante Jeanne MOREAU et de Georges GERET, il faut citer le remarquable Michel PICCOLI dans un rôle d'obsédé sexuel.

Critique acerbe de la bourgeoisie provinciale dans la France de l'entre-deux-guerres avec ses tics et ses tares, cette œuvre s'avère être aussi une peinture noire et sordide de la société humaine.
Y-a-t-il pour autant un message politique en filigrane ?
En tout cas pour Célestine la femme de chambre, la lutte des classes n'est pas une option.
Elle ne veut pas changer la vie, elle veut changer de vie et la servante choisit finalement d'être servie.