Shock Corridor - 1963 - Samuel Fuller

Faja Sam 16 Avr - 8:07

Afin d'enquêter, un journaliste ( Peter BRECK ) se fait passer pour fou et interner dans un établissement psychiatrique où un crime a été commis.
Son seul lien avec l'extérieur, c'est sa compagne ( Constance TOWERS, exceptionnelle comme toujours ), une charmante effeuilleuse qui lui rend visite régulièrement.
Mais au fur et à mesure que ses investigations progressent, il oublie qu'il y a des limites au delà desquelles la raison chavire...

C'est un petit film en noir et blanc - avec quelques scènes en couleur - tourné en 10 jours et réalisé avec des moyens dérisoires.
Mais c'est surtout un grand choc visuel, sonore et mental.
Pendant près d'une heure et demie, Samuel FULLER enferme le spectateur avec des personnages complétement déjantés, dans une "clinique mentale" dont toutes les pièces donnent sur un long couloir appelé "La Rue" où seuls les patients les plus sages sont autorisés à se retrouver comme dans une cour de récréation.

Après avoir vu ce film que Fuller qualifie lui-même de "mélodrame incisif" c'est à dire dépourvu de toute sentimentalité, on ne peut plus l'oublier.

Reporter dans des journaux populaires pour la rubrique des faits divers avant de devenir cinéaste, Samuel Fuller aime avant tout raconter des histoires ; dans un style nerveux, il filme comme il écrirait un article de journal pour captiver le lecteur au sens premier du terme de "rendre captif" ; il rapporte les faits bruts et crus ; il montre sans chercher à démontrer.

C'est ainsi que SHOCK CORRIDOR raconte non seulement l'histoire du journaliste mais aussi celle de plusieurs malades mentaux qui sont internés avec lui :

- un ancien combattant de la guerre de Corée qui a trahi son pays et se prend pour un général sudiste.
- un jeune noir traumatisé par le fait qu'il était le seul étudiant de couleur dans une université du Sud et qui se prend pour un dirigeant du Ku Klux Klan.
- un homme obèse qui a tué sa femme "doucement, en chantant" dit-il, parce qu'il a "horreur des boucheries" et se prend pour un artiste lyrique.
- un vieil homme, prix Nobel de physique, spécialiste de la bombe atomique, qui est retombé en enfance.

A travers ces personnages, Samuel Fuller dresse en fait le catalogue de toutes NOS FOLIES : la guerre, le racisme, la violence, la destruction.
Comme en ce 21ème siècle rien n'a changé et que la sauvagerie aliène toujours les hommes, il est urgent de voir ou de revoir ce chef-d'œuvre.